Le temps des super héros

Bienvenue dans une nouvelle ère, l’ère digitale. Je suis en effet intimement persuadé qu’avec le recul de quelques décennies nous réaliserons bientôt qu’à l’aube de ce troisième millénaire, nous sommes entrés dans un nouvel age, où le numérique a bouleversé de nombreuses règles du jeu. Un nouveau monde peuplé de super héros, les Digital Natives.

Rapellez-vous, il y a peu nous vivions dans l’ère analogique. Cet ancien monde vivait sous le joug de la rareté : rareté des ressources et des matières premières, rareté des moyens de communication, rareté des informations, rareté des possibilités d’accès à l’audience.

Dans le nouveau monde numérique, nous croulons littéralement sous l’abondance de l’offre. En effet en passant des atomes aux bits, certaines règles élémentaires d’économie sont devenues instantanément obsolète. Il n’y a par exemple pas de limite technique dans la multiplication et la distribution des produits et services immatériels. Dans l’ancien monde, pour partager un bien, on devait le diviser, ces deux verbes étaient même synonymes. Dans le monde digital, lorsque nous partageons un bien numérique, celui-ci se multiplie, créant ex nihilo de la valeur. Lorsqu’il s’agit de biens culturels, de connaissance, cette richesse est au bénéfice de toute la collectivité. Musique, films, jeux, télé, livres, … peu de la production culturelle échappe à cette lame de fond. Quand à la connaissance, elle percole à travers tous les canaux digitaux, site web, forums, blogs, emails, communautés en ligne, à commencer par Wikipedia. Meme les relations entre personnes se démultiplient, comme le montre le succès des réseaux sociaux comme Facebook et Twitter.

D’ici quelques décennies, le temps que les Digital Immigrants que nous sommes aient disparus, le monde ne sera plus peuplé que de Digital Natives, une nouvelle génération qui n’a jamais connu un monde sans Internet et qui considèrent les smartphones, ces prothèses digitales connectées en permanence au réseau, comme faisant partie intégrante de leur existence.

A notre insu, et plus rapidement que par évolution de notre ADN, l’espèce humaine a muté technologiquement. Les Digital Natives se rapprochent en effet des cyborgs décrits dans les romans de science-fiction du milieu du 20ème siècle. Ils sont dotées de super pouvoirs, à peine imaginables il y a seulement un siècle. Des aptitudes quasi divines : ils ont un accès instantané à quasi toute information par Google, video sur Youtube, à la connaissance par Wikipedia, ils sont capable d’être informé en temps réel de tout évènement à travers la planète par Twitter et les RSS feeds, à propos de la vie de leurs amis par Facebook et Netlog, il peuvent communiquer en images et son par Facetime et Skype, assister a n’importe quel évènement par Qik ou Ustream, ils peuvent consulter des millions d’ouvrages par Amazon Kindle et iBook, écouter n’importe quel morceau de musique à tout instant par Spotify, voir n’importe quel film par Netflix, ils peuvent enregistrer leur souvenirs par photo, ou en vidéo haute définition, il peuvent publier planétairement, n’importe quoi, n’importe quand via leur blog, leur podcasts, …

Ayant accès à des bibliothèques infinies et inépuisables, cette nouvelle génération perdra, à terme, le goût de consommer : pourquoi convoiter des objets physiques disponibles à portée de clavier et pour un coût quasiment dérisoire ? Pourquoi continuer de remplir ses étagères de boîtes et de CD quant leur contenu est entièrement virtualisé ? La possession qui n’aura d’autre finalité qu’elle-même tendra donc à disparaître à mesure que toute la connaissance se numérisera.

Le communicator de Star Trek, le cyberspace de William Gibson, la novlangue d’Oceania dans 1984 de Georges Orwell, Xanadu de Ted Nelson, les terminaux futuristes de Minority Report de Philip Kindrey Dick sont tous devenus réalité. Tout comme le Mundaneum de Paul Otlet et la bibliothèque universelle de Borgès, deux intellectuels qui avaient tous deux rêvé une connaissance totale et absolue, y trouveront à la fois la réalisation et l’achèvement de leur projet.

Pourtant dans ce monde digital merveilleux ou monstrueux (selon que l’on soit consommateur ou marchand de bien immatériel), les Digital Natives, démiurges affranchis des barrières de la matière, n’auront toujours qu’une seule vie et 24 heures par jour à leur disposition. Les nouvelles technologies permettent de tout dupliquer… sauf les secondes et les minutes.

Sources innombrables de jouissance infinie d’un côté, temps fini de l’autre. Cette mutation anthropologique va obliger les annonceurs à repenser en profondeur le rapport au client. Puisque la consommation n’est plus un but et une valeur en soi, les entreprises devront apprendre à transformer leurs marques en vecteurs de sens : comment mon produit, mon service, mon message, ma campagne, … peut-elle aider des consommateurs à donner une signification supplémentaire à leur existence ? Comment, dans l’infinité des choix possibles, puis-je aider mes clients à effectuer le bon, celui qui correspond réellement à ses attentes ?

Autant de challenges fondamentaux qui attendent les entreprises dans les prochaines années.

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